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12 décembre 2013

Réfractions | Les conflits, c’est la vie !

Réfractions - Les conflits, c'est la vie !Au sein du collectif de rédaction de Réfractions, qui est, comme on le sait, composé d’individualités aux orientations libertaires les plus diverses, nous avons rencontré des conflits qui ont fait surgir l’idée de consacrer à ce phénomène, et au traitement original dont il pourrait bénéficier chez les libertaires, un numéro de notre revue. L’histoire même de Réfractions est traversée de heurts, dont certains ont conduit au départ de membres du collectif et qui chaque fois posent la question de savoir ce qui l’emporte, du stimulant et du mortifère, du constructif et du destructeur.
Par ailleurs, nous savons, par les liens qui nous unissent avec le milieu libertaire, que celui-ci est régulièrement traversé par des différends plus ou moins profonds, notamment dans les organisations qui le structurent, de sorte que nous en sommes arrivés à nous dire que les questions que nous nous posions à ce propos pouvaient être partagées plus largement.

Il est vrai que les conflits, ce n’est pas seulement ce qui traverse un collectif, et il y aurait peut-être lieu de distinguer le conflit externe (ce contre quoi les libertaires sont en conflit : le capitalisme, l’État, le patriarcat, et plus généralement toutes les formes de domination) du conflit interne (celui qui peut les diviser), et en tout cas de se demander si, dans leurs théories et dans leurs pratiques, les singulière. Mais un conflit, c’est d’abord un phénomène, quelque chose qui est de l’ordre de la rencontre et du heurt, sous-tendu par un antagonisme, bien souvent fondé sur la domination et l’inégalité, instituée ou non.

Ce qui a surgi d’emblée, c’est la difficulté qu’il y a à s’exprimer sur un conflit, tout particulièrement lorsqu’on en a été (et plus encore lorsqu’on en est) partie prenante. Ces difficultés, ces réticences, ces retenues tiennent au moins à trois séries de raisons. En premier lieu, tout conflit comporte une dimension affective et personnelle.
Habituellement, cette dimension sert à disqualifier un certain type d’affrontements, ou au contraire à le valoriser (« Il n’y a là rien de personnel ! »), mais peut-être un point de vue libertaire sur les conflits consiste-t-il d’abord à souligner que chacun d’eux met aux prises des personnes, avec leurs histoires et leurs affects et que, loin d’en évacuer la dimension personnelle, une tentative de se confronter positivement au conflit devrait intégrer cette perspective.

En second lieu, c’est peut-être l’une des caractéristiques de tout conflit, et notamment de ceux qui sont internes, que les parties en présence refusent de reconnaître qu’elles sont en conflit : ce qui s’exprime d’abord, ce n’est pas cette reconnaissance, mais un ensemble de griefs, d’accusations, éventuellement d’agressions contre l’autre partie. Identifier le différend comme tel, pouvoir en parler, c’est peut-être déjà se trouver sur la voie de sa résolution.

Mais précisément, en troisième lieu, c’est l’impossibilité d’un point de vue impartial (impossibilité positive qui est peut-être constitutive d’un point de vue anarchiste sur toute lutte) qui peut expliquer les réticences à s’exprimer sur tel ou tel affrontement. Le risque est que tout discours sur un conflit existant soit perçu comme une manière de le poursuivre, voire de prendre le dessus sur l’adversaire par des moyens sournois, en se parant du manteau de l’objectivité, en adoptant la posture du chevalier blanc qui, se trouvant au-dessus de la mêlée, peut juger de l’extérieur.

Ce n’est pas seulement en raison de ces difficultés que ce numéro ne consiste pas en un catalogue des divisions, présentes ou passées, en milieu libertaire. Bien plutôt, les différentes contributions qui le composent tentent d’explorer, à partir de heurts réels qui nous ont paru significatifs, plusieurs choses. Il s’agissait d’abord de savoir s’il était possible de définir une position singulière de anarchistes sur la question du conflit en général, et de leurs conflits en particulier. Il existe, chez plusieurs auteurs de la tradition anarchiste, une véritable pensée de l’antagonisme, pensée qui, sans toutefois être jamais exempte de tensions internes (encore heureux !), a pour point commun le refus d’une instance transcendante qui réglerait les litiges. Ce mode d’appréhension nous a semblé mériter d’être confronté avec d’autres, qu’il s’agisse de courants idéologiques ou d’autres cultures. Il s’agissait en outre de savoir dans quelle mesure les anarchistes ont pu penser et pratiquer des manières originales de résoudre ou de désamorcer des conflits, depuis les jurys d’honneur jusqu’aux groupes affinitaires, en passant par la pratique du consensus formel. Aucune de ces manières ne constitue une recette pour en finir avec la conflictualité. Elles sont bien plutôt l’indice que l’anarchisme se confronte véritablement aux antagonismes, y compris dans ce qu’ils peuvent avoir d’interminable ou d’insoluble.

Ce qui nous a semblé ressortir de cette confrontation, c’est que toute vie collective est traversée de conflits, pour lesquels se pose la question de leur caractère moteur ou paralysant. Qu’on le dise pour les célébrer ou parce qu’il faut bien vivre avec, les conflits, c’est la vie…

 

DOSSIER

- Anarchie, conflit
L’anarchisme et ses conflits, Jean-Christophe Angaut

- Anarchie, révolte et conflits : la solution proudhonienne, Daniel Colson

- Histoires de loups, de cochons et d’autres vivants, parmi lesquels des humains, Alain Thévenet

Rencontrer des conflits

- Attention, un conflit peut en cacher un autre, Bernard Hennequin

- À propos d’un conflit récent, Alain Thévenet

- Aux sources sourdes de la puissance, Quelques débrayeuses

- Tentative de compréhension du cas des éditions Agone, Annick Stevens (du fait de l’actualité de ce texte et à la demande de plusieurs personnes nous le mettons en ligne avant le reste du numéro)

- Sur les photos d’affiches publiées dans ce numéro, Céline Bondaz

Anarchive - Ce qui ne va pas au sein de la FA (1971), Pierre Jouventin

Transversale - Archipel libertaire, André Bernard et Pierre Sommermeyer

Courrier

Les livres, les revues, etc.

Sources : site Réfractions

 

 

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